samedi 28 mai 2016

Dents du loup : Le grand bain sans brassards... ou à peu près !

Récit par Anaïs, Nico et Pierrick (photos) d'une sortie entre GAGistes sans les encadrants ! Ben oui le but après tout c'est bien qu'ils se passent de nous ;p 
Ils ont donc parcouru les belles arêtes des dents du loup en Belledone, le 28 Mai (oui je suis en retard sur ce coup là !!).
Sous la face N du Colon

Il y a un chat noir dans le GAG 2015-2016 : on s'est pris cette année tellement de buts météo qu'on a pu faire de l'alpi caillou comme en été... Ça nous aura au moins permis de peaufiner longuement pose de coinceurs, friends, et autres protection rocher, de tester la recherche d’itinéraire boiteuse en environnement hostile et jardins municipaux, et de topoter comme des fous en actualisant frénétiquement la météo toute la semaine avant les sorties, pour imaginer un plan A, un plan B, voire un plan C. La loose, mais constructive. Et de bonne humeur.

Bref, on a les bases. Et du coup, on a les crocs.

Un week-end annoncé potable, rien de prévu, les encadrants du GAG qui prévoient une école de coinceurs ? Pas besoin de plus pour se chauffer, c'est décidé: on fait une première sortie autonome. Concertation, réflexion, consultation : on enchaînerait bien 2 courses tant qu'on y est, alpi rocher abordable (reste de la neige), pas trop fréquenté, pas trop loin, ambiance et maîtrise. Comme on peut pas vraiment dire qu'on est blasés du fait d'avoir sur-fréquenté les massifs du coin, ça ouvre pas mal de portes. Et comme il nous manque un complément, on puise dans les réserves du GAG étendu, la fine équipe de la journée de sélection: ça tombe bien, Luc est chaud.

On ira donc en Belledonne, direction les dents du loup Samedi, les dalles du Galeteau dimanche, avec la nuit au refuge de la Pra. C'est validé par la hiérarchie (oui, on demande encore, on garde les petites roulettes) ça a l'air joli, abordable, tip top pour un démarrage. Évidemment, le mini but météo s'y met, on ne garde que les dents du Loup, et on va tâcher d'être redescendus avant la flotte de l'aprèm. J'étais prêt pour la Walker dans les grandes Jorasses, Rob a émis quelques réserves. Le manque de confiance patent, je vous jure...

Départ à l'heure (forcément, pas d'encadrants), 7 heures au parking de Freydières, le fond de l'air est chaud même si le type devant qui porte ses skis n'a pas l'air au courant. Il veut sans doute profiter des 40 cm de fraîche qu'il est tombé pendant la nuit. Ah non, pardon.

Mine de rien, on avoine : 1h20 pour le lac du Crozet, moins de 2 heures pour arriver au pied de la crête qui amène au petit râteau. Sans les encadrants pour nous ralentir, on peut enfin hausser le rythme. On s'équipe, grignote un bout, se répartit le jeu de friends qu'on a pour les 2 cordées : Pierrick et Luc, Anaïs et moi.  On voudrait mettre les crampons et sortir le piolet, mais c'est difficile à justifier...
Départ de Freydière
Au dessus du Crozet
A l'attaque !
 
A l'attaque du petit râteau, première bosse, c'est serein. Je sens qu'on a déjà vraiment progressé, plus efficaces, plus rapides, concentrés. On comprend ce qu'on fait, on ajuste. On admire le paysage, goûte l'ambiance et Pierrick engage le fil de l'arête, évident. J'emboîte le pas de Luc qui part en corde tendue, on va essayer d'être rapides. Je teste une variante qui m'attire, un poil dure pour Anaïs qui m'insulte en grimpant, et on arrive vite au pied d'une jolie dalle bien fracturée. Le rocher n'est pas très bon, mais il mène au replat au sommet du petit râteau.
On s'applique, cherchant les meilleurs endroits pour poser des protections, testant le rocher, pratiquant des gestes qui viennent seuls, relais sur sangle sur un gros becquet, demi cab pour faire venir le second ; on perd presque un poil de temps à vouloir faire comme à la parade. Mais c'est vraiment bon, on est seuls devant une jolie arête, effilée, attirante.

Toujours en corde tendue, Pierrick et Luc vont chercher le premier rappel au bout du fil, on leur emboîte le pas, pas trop proches, l'arête est courte et la place au bout limitée. J'arrive au moment du plat de nouilles, et goûte avec délice un passage qui m'aurait paralysé il y a quelques années. Décidément, ça va mieux mon vertige.

Passés les soucis de corde sur lesquels il reste des progrès d'organisation à faire (Pierrick, c'est de toi que ça cause), on passe au rappel, et là aussi on enchaîne bien, comme à l'entraînement : pose du machard sur corde pendant que le précédent descend, main au dessus du machard,... on gère. Sauf qu'on descend bien trop bas, on se rappelle un peu tard des CR de sorties C2C qui parlent de bien viser la brèche pour éviter les emmerdes. C'est pas grave, on galère un peu pour rappeler la corde, et on en est quitte pour brasser un peu dans la neige pour remonter à la brèche : on a pas fait assez de mixte cet hiver, ça manquait.
Montée au Râteau
Rappels sous l’œil vigilant de Rex
 
C'est l'arête des dents du loup : Pierrick repart devant, on s'est mis d'accord sur le fait que je me tape LA longueur de la course, le petit 4 des familles sur rocher pourri difficile à protéger sur les 15 premiers mètres. J'en salive d'avance. Mais pour l'heure, c'est Anaïs qui part en tête, donc c'est elle qui raconte.
« Me voilà partie à la suite de Luc, on ne change pas une première cordée qui gagne. Même si je prends des précautions, comme à mon habitude, en testant les cailloux sous mes mains et en progressant tranquillement, j’avance à un rythme correct et sans difficultés – l’arrête est douce, avec de bonnes prises et de jolies marches, ni trop effilée ni trop large. J’en suis heureuse car j’avais hésité : est-ce que je pars devant, ne me sentant pas encore très sereine avec mon niveau technique limité et mon appréhension de la tête qui n’a pas complètement disparu ? (n’oublions cependant pas que j’ai fait l’arrêt à Jojo :). Mais Rex (ndle : la mascotte offerte par le GAG pour ses 24 ans, une charmante tortue) est là pour me donner confiance, posé (ou pendu ?) sur le côté de mon sac. Je me prends même à m’amuser faire passer les cordes autour des becquets, l’une d’un côté, l’autre de l’autre. Finalement, je rejoins Pierrick et Luc sur le replat avant même d’avoir pu mettre un friend (qui tienne). Nous posons le deuxième rappel en visant mieux cette fois-ci ».    

C'est parti pour le crux, l'attaque de la jumelle : vu de près, c'est nettement moins impressionnant, cette longueur. Dedans aussi. Par contre, le rocher est vraiment pas bon, et c'est vrai que ça se protège pas super bien : premier coinceur béton après 15 mètre, auquel on rajoute une sangle pour faire l'appoint, et on est vite en haut, gros becquets, relais confort. c'est presque fini : Anaïs est devant, montagne russes sur sentes herbeuses et remontée sur l'arête, avant la désescalade finale qui mène au rappel, et hormis la petite alerte de Luc qui échappe son reverso (puisque ça s'était beaucoup trop bien passé), la fin est sans accroc.
Dans la longueur clé
 Au final, cette première est passé comme un rêve, 5 heures sur l'arête pour 2 cordées, on est plutôt contents : on se rend compte qu'on a déjà intégré beaucoup de choses, et que même si l'expérience doit venir renforcer tout ça, on a déjà énormément progressé depuis Septembre. Ce qui me marque plus que le côté serein, c'est que l'enchaînement des gestes me paraît naturel, réflexe.
Bref, la première d'une longue série. Long live ze gag.